Francis Scarpaleggia
Francis Scarpaleggia
Député de Lac-Saint-Louis
Discours : étude sur les politiques fédérales en matière d’eau douce (1)
29 octobre 2020

Madame la Présidente, ce soir, je me lève à la Chambre en appui à ma motion, qui demande à la Chambre d'envoyer le signal que c'est le moment de lancer une étude approfondie et non partisane sur l'amalgame de politiques relatives à l'eau dans l'appareil fédéral. Soyons clairs: cette ressource est sous l'ultime responsabilité des provinces.

J'ai toujours eu un intérêt, un penchant, pour la question de l'eau.

Il est toujours difficile de savoir la raison qui nous attire vers un sujet plutôt qu'un autre. Dans mon cas, cela tient peut-être au fait que ma circonscription de Lac-Saint-Louis est bordée sur trois côtés par d'importants cours d'eau, le fleuve Saint-Laurent au sud, la rivière des Prairies au nord, et le lac des Deux-Montagnes, marquant la fin de la rivière des Outaouais, à l'ouest.

Lorsque je suis arrivé au Parlement, j'ai constaté à ma grande surprise qu'on ne parlait pas d'eau. On ne parlait pas du rôle du gouvernement fédéral dans la protection de notre ressource de loin la plus chère. À l'époque, on commençait à peine à parler des changements climatiques. Mentionnons au passage que, là où le bât blesse en matière de changements climatiques, c'est en lien avec leurs conséquences sur l'eau.

Les gaz à effet de serre sont invisibles, bien sûr. Les inondations et les sécheresses causées par les changements climatiques, elles, ne sont pas invisibles. On a parlé d'eau dans les années 1980 et 1990, mais plus ou moins uniquement dans le cadre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis. À l'époque, on craignait que cette entente n'ouvre un jour la porte à l'exportation massive de notre eau vers notre voisin du sud pour satisfaire sa soif. Si je ne m'abuse, les députés néodémocrates ont fait beaucoup de travail sur cette question, déposant des projets de loi pour interdire la possibilité de telles exportations.

En arrivant à Ottawa, je suis quand même tombé sur le programme de la région des lacs expérimentaux, alors ancré au sein du ministère des Pêches et des Océans. La région des lacs expérimentaux est un laboratoire en pleine nature qui englobe 58 lacs. Il s'y est réalisé et l'on continue d'y effectuer certaines des plus importantes expériences en temps réel au monde sur les effets de la pollution sur nos écosystèmes aquatiques. Au fil des ans, le travail des chercheurs des lacs expérimentaux a grandement et concrètement profité à plusieurs régions du pays, notamment au Québec et à l'Ontario, qui abritent des centaines de milliers de cours d'eau, y compris les Grands Lacs et le fleuve Saint-Laurent.

C'est grâce aux études effectuées dans la région des lacs expérimentaux que nous avons fini par retirer les phosphates des détergents à lessive. C'est aussi grâce aux études effectuées dans la région des lacs expérimentaux que nous avons aujourd'hui l'Accord Canada-États-Unis sur la qualité de l'air pour lutter contre les pluies acides, ainsi que la Convention de Minamata sur le mercure, des Nations unies. C'est enfin grâce aux chercheurs des lacs expérimentaux que nous avons pu épargner des milliards de dollars qu'on aurait peut-être consacrés à enlever l'azote de nos eaux usées. Les recherches aux lacs expérimentaux ont servi à démontrer que ce genre d'intervention ne réglerait en rien le problème des proliférations algales.

Sans aucune ingérence dans les champs de compétence des provinces, une instance de recherche scientifique financée par le gouvernement fédéral a réalisé maintes avancées dans la saine gestion de nos écosystèmes aquatiques. Il existe de nombreux autres exemples où le gouvernement fédéral apporte une importante contribution en matière de protection de nos réserves d'eau douce sans aucunement empiéter sur les champs de compétence des provinces.

Par exemple, Santé Canada siège à un comité fédéral-provincial dont le mandat est de recommander et de réviser des normes en matière d'eau potable. Ces normes ne sont pas imposées aux provinces, elles sont volontaires, mais je tiens à noter que le Québec prend très au sérieux la nouvelle norme en matière de concentration du plomb dans l'eau potable. Québec passe à l'action pour permettre de changer les canalisations d'eau partout en province, surtout à Montréal.

En plus de Santé Canada et de Pêches et Océans Canada, il y a au moins une douzaine d'autres ministères ou organismes fédéraux qui ont une responsabilité particulière en lien avec la gestion de l'eau au pays, toujours dans le respect des compétences provinciales. Par contre, il existe un domaine qui relève exclusivement de la compétence du fédéral: l'eau potable dans les communautés autochtones. Ce dossier en est un auquel le gouvernement accorde une attention particulière depuis son élection en 2015, et avec succès pour ce qui est de l'objectif d'éliminer une fois pour toutes les avis d'ébullition d'eau potable prolongés.

Fait intéressant à noter, il n'y a aucun avis d'ébullition d'eau à long terme ou à court terme dans les communautés autochtones du Québec. L'étude que je propose pourrait bien servir à mettre en lumière les facteurs qui ont donné lieu à ce bilan tellement positif.

Il faut noter qu'un autre ministère est impliqué dans le dossier de l'eau potable dans les communautés autochtones. Il s'agit de Services publics et Approvisionnement Canada, qui a la responsabilité de gérer les appels d'offres lorsqu'on planifie l'achat ou la construction d'une usine d'assainissement des eaux usées en milieu autochtone.

Parmi l'éventail de ministères fédéraux impliqués dans la protection et la gestion de l'eau au pays, n'oublions surtout pas Infrastructure Canada, qui finance des projets de modernisation des réseaux d'aqueduc ou de construction d'usines d'assainissement des eaux usées, sans parler des sommes qu'il verse par le truchement du Fonds d'atténuation et d'adaptation en matière de catastrophes, ainsi que du sous-volet de l'adaptation au changement climatique compris dans le volet de l'infrastructure verte du programme d'infrastructure Investir dans le Canada.

À Environnement Canada, il y a le Centre météorologique canadien, situé à l'angle du boulevard des Sources et de l'autoroute 40. Ma collègue de Repentigny connaît certes ce centre, car elle passe devant chaque fois qu'elle parcourt le chemin entre sa circonscription et le Parlement. Le Centre météorologique canadien met régulièrement son expertise à la disposition du gouvernement du Québec pour l'aider à prévoir la crue printanière, qui fait de plus en plus de dégâts dans nos collectivités, y compris dans la mienne, à cause des changements climatiques.

Il y aussi Ressources naturelles Canada. Comme on peut le voir sur son site Internet, ce ministère dispose d'une équipe de scientifiques qui fournit aux intervenants d'urgence et aux municipalités les données dont ils ont besoin pour prendre des décisions. Cette équipe recueille des données au moyen d'images de satellites radars et produit en temps quasi réel des cartes destinées aux intervenants d'urgence en situation de crise, par exemple lors d'inondations.

J'ai parlé d'un nombre limité d'agences et de ministères fédéraux qui sont impliqués dans la gestion de nos réserves en eau douce tout en laissant aux provinces leur responsabilité première pour cette ressource. Comme mentionné déjà, il y en a au moins une douzaine, même presque 20.

Le but de cette étude proposée serait de mieux comprendre les rôles individuels de ces instances fédérales ainsi que leurs interactions en vue d'une politique fédérale de l'eau plus rationnelle et efficace, y compris pour mieux soutenir les autres paliers de gouvernement. Il n'est pas question que cette étude serve de cheval de Troie pour envahir les compétences des provinces en matière d'eau ou empiéter sur celles-ci.

L'eau n'est pas un enjeu comme les autres, sur le plan des compétences. L'eau ne suit pas les mêmes règles que d'autres éléments dont la gestion demeure en vase clos. L'eau, en raison de sa nature, exige collaboration entre provinces. Pensons à la rivière des Outaouais, qui se déverse dans le lac des Deux Montagnes, ensuite dans le fleuve Saint-Laurent, puis dans la rivière des Prairies, pour ensuite se rendre à l'est de Montréal, et encore plus loin passé Sorel.

L'eau exige collaboration entre régions. L'eau exige collaboration entre pays afin d'assurer notre sécurité hydrique commune et le droit à l'eau pour ceux et celles dans le monde qui se trouvent en manque de cette ressource vitale.

La Communauté européenne, ce partenariat de pays souverains aux longues histoires et aux grandes cultures et qui voient grand quant aux défis de l'heure, a bien compris la nécessité de travailler ensemble pour assurer sa sécurité hydrique à l'ère des changements climatiques. Notamment, elle a adopté en 2000 la directive-cadre européenne sur l'eau, laquelle établit un cadre pour une politique communautaire globale dans le domaine de l'eau.

Il faut mettre de l'ordre dans l'appareil fédéral quant à ses politiques relatives à l'eau douce.

Les changements climatiques, la pollution et le développement urbain mettent nos ressources hydriques à risque. Les répercussions ne se limitent pas à un seul lieu géographique. Les cours d'eau traversent les régions. Il nous faudra collaborer de plus en plus entre régions et entre provinces afin d'assurer notre sécurité hydrique commune.

Cette étude nous aidera à tracer l'avenir en matière de cette collaboration, y compris la collaboration entre scientifiques, qu'ils soient situés à l'Université de Montréal, à l'Université de l'Alberta ou à l'Université du Québec à Chicoutimi.

Il faut que les députés de toutes les régions et de toutes les allégeances politiques soient à la table ou à l'écran dans le contexte actuel de la pandémie. Peu importe le mode de communication, il faut être au rendez-vous comme ils le sont en Europe, par exemple.

 

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