Francis Scarpaleggia
Francis Scarpaleggia
Député de Lac-Saint-Louis
Discours : Loi sur les mesures d’urgence
19 février 2022

Madame la Présidente, je tiens, comme le député précédent, à remercier les membres du Service de protection parlementaire et les agents de la paix qui sont venus à Ottawa pour dénouer cette situation sans précédent.

Il y a eu beaucoup de désinformation, de malentendus et d’incompréhension autour de la pandémie, des mesures de santé publique nécessaires, et de l’opposition possible entre ces mesures et les droits garantis par la Charte des droits et libertés. Avant même que ne commencent les événements qui se déroulent actuellement à Ottawa, beaucoup de gens m’ont écrit pour me parler des exigences liées à la santé publique et me dire qu’elles contrevenaient aux droits garantis par la Charte.

Nous avons tous la responsabilité de dire aux gens de nos circonscriptions respectives, comme je le fais, que les exigences et les restrictions liées à la santé publique, qui sont en voie d’être assouplies et éliminées, ne contreviennent pas aux droits garantis par la Charte. Si elles avaient contrevenu à ces droits, des gens auraient intenté des poursuites, des juges auraient rendu des décisions et les exigences auraient été annulées. C’est ainsi que fonctionne notre démocratie.

En fait, à Terre-Neuve, au tout début de la pandémie, on a imposé une très sérieuse restriction de santé publique qui interdisait à quiconque d’entrer dans la province à moins de fournir une attestation médicale. L’affaire a été portée devant les tribunaux, qui ont conclu que cette mesure de santé publique ne constituait pas une violation des droits garantis par la Charte. Il est très important, et il est de notre devoir en tant qu’élus, de réitérer aux Canadiens que leurs droits garantis par la Charte n’ont pas été violés. Oui, ces mesures ont été contraignantes, mais ces contraintes ne constituent pas nécessairement une violation des droits prévus par la Charte.

Certains répondront à cela qu’ils ne veulent pas parler des tribunaux parce qu’ils font partie du gouvernement, ou parce qu’ils sont truffés de juges à l’esprit libéral. À partir du moment où on ne s’entend plus sur la structure de notre démocratie et son fonctionnement, il est impossible d’avoir des conversations constructives. Tout projet de loi déposé à la Chambre est accompagné d’un énoncé concernant la Charte. Bien que les décrets ne nécessitent pas d’énoncé officiel, ils sont vérifiés pour valider leur conformité à la Charte.

Il est également important de rappeler aux Canadiens que ce que nous avons vu devant le Parlement et à de nombreux postes frontaliers du pays, ce ne sont pas des manifestations pacifiques et légales. Nous devons rappeler aux Canadiens qu’il s’agit de rassemblements illégaux qui ont débordé du cadre raisonnable d’une manifestation légitime fondée sur les droits et libertés protégés par la Constitution.

Le soi‑disant « convoi de la liberté » est venu aussi avec son lot d’effets négatifs, surtout pour les habitants d’Ottawa. Des entreprises du centre-ville ont dû fermer leurs portes et des travailleurs qui doivent subvenir aux besoins de leur famille sont privés de travail, et de salaires, depuis trois semaines. Parallèlement, d’autres Canadiens ont subi des pertes de revenus en raison des bris dans la chaîne d’approvisionnement à la frontière. Toutes ces personnes ont subi les conséquences très réelles de ces barrages illégaux.

Pour en revenir aux habitants d’Ottawa, j’aimerais vous lire un extrait d’un article qui a récemment été publié dans le Globe and Mail. On y parle de l’impact des barrages au centre-ville d’Ottawa sur la santé mentale de ses habitants. Je cite: « Les experts s’inquiètent des effets à long terme du stress sur la santé des habitants, qui doivent aussi composer avec une pandémie. » Puis, l’article cite Mme Ivy Bourgeault, professeure titulaire en Études sociologiques et anthropologiques, à l’Université d’Ottawa, qui a dit: « Je ne crois pas que les habitants auront le même regard qu’avant sur leur environnement. Quand d’autres manifestations surviendront, ce sera un élément déclencheur pour eux. » Puis elle ajoute: « L’incertitude et le fait de n’avoir aucun contrôle causent un stress énorme, qui vient s’ajouter aux facteurs de stress chroniques qui affligent la population depuis le début de la pandémie. » Je pourrais continuer à fournir des exemples.

Je voudrais également parler des répercussions économiques. J’en ai déjà parlé, dans une question posée à l’un des députés qui a pris la parole. Ce que j’essayais de dire, c’est que si quelqu’un voulait miner la sécurité d’une nation, en particulier d’une nation marchande qui importe la plupart de ses produits d’une nation voisine comme les États-Unis, il en bloquerait les points d’entrée. Cela nuirait à cette nation. Ils bloqueraient le pont Ambassador. Ils bloqueraient les passages au Manitoba et en Alberta. Ils bloqueraient 12 autres points d’entrée. Bien sûr, ils violeraient aussi les limites de l’esplanade de l’Agence des services frontaliers du Canada à Fort Erie, ce qui entraînerait la fermeture du bureau pour empêcher d’autres manifestants d’entrer. C’est ce que quelqu’un ferait s’il voulait miner la sécurité de ce pays.

J’ai observé la réaction de l’opposition officielle. Je ne veux pas être partisan, car il ne s’agit pas d’une question partisane. J’ai observé le raisonnement et le message de l’opposition officielle depuis quelques semaines. La première idée que l’opposition officielle a essayé de faire passer était que si le premier ministre s’asseyait et prenait une tasse de café avec des organisateurs antidémocratiques, tout le monde rentrerait chez soi heureux. Je ne crois pas qu’un soi-disant parti de la loi et de l’ordre puisse vraiment croire en cette idée.

Ensuite, l’opposition officielle a donné foi à l’idée voulant que la police soit dirigée par le gouvernement fédéral. Si la manifestation est toujours là, c’est la faute du gouvernement fédéral, car il contrôle les forces de l’ordre. Beaucoup de gens le croient. De nombreuses personnes m’ont écrit pour me demander pourquoi nous ne pouvons rien faire à ce sujet. Je leur rappelle que dans une démocratie constitutionnelle, les gouvernements, qu’ils soient municipaux, provinciaux ou fédéraux, ne dirigent pas la police.

Quand le gouvernement a finalement fait quelque chose en invoquant la Loi sur les mesures d’urgence, l’opposition officielle a reculé, choquée. Elle a demandé comment nous pouvions penser à faire cela, après avoir dit au gouvernement qu’il ne faisait rien. Il y a beaucoup de contradictions dans les messages de l’autre côté, mais laissons cela de côté pour un moment.

Un autre point qui a été soulevé est que la situation aurait pu être gérée normalement en utilisant des lois ordinaires, mais nous avons vu pendant trois semaines que la police d’Ottawa était débordée. Elle ne pouvait rien faire, et nous l’avons vu. C’est un fait historique. Pendant trois semaines, la police d’Ottawa n’a pas pu maîtriser la situation. Ce n’était pas la police fédérale. Ce n’était pas la police provinciale. C’était la police d’Ottawa.

Qu’est-ce que la Loi sur les mesures d’urgence a permis de faire? Elle a permis à la police d’Ottawa d’être soutenue par les forces de police de sept autres municipalités, je crois. Qu’est-ce que la Loi sur les mesures d’urgence a permis de faire? Elle a permis à ces policiers de se joindre à la police d’Ottawa et de l’aider à lever les barrages devant les édifices du Parlement, sans qu’il soit nécessaire d’affecter chaque agent dans le cadre d’un processus bureaucratique.

Madame la Présidente, je crois qu’il nous incombe aussi de dire à nos citoyens ce que fait la Loi sur les mesures d’urgence et ce qu’elle ne fait pas.

Premièrement, ce n’est pas la Loi sur les mesures de guerre. Je sais que certains députés ont tenté d’établir un lien subtil avec celle-ci. D’autres ont été moins subtils, mais il ne s’agit pas de la Loi sur les mesures de guerre.

Deuxièmement, la Loi sur les mesures d’urgence ne suspend pas les droits garantis par la Charte. Nous revenons à la Charte des droits. Il est important de dire aux citoyens que la loi ne suspend pas les droits garantis par la Charte.

Troisièmement, la loi ne met pas les services de police locaux sous l’autorité du gouvernement fédéral.

Quatrièmement, elle ne supprime pas le droit de manifester légalement. Que fait-elle? Elle donne au CANAFE la capacité d’arrêter le flux du soutien financier, dont une grande partie provient de l’étranger, du Sud de la frontière plus particulièrement. Ce pouvoir est important. Le CANAFE est toujours tenu de respecter la Charte canadienne des droits et libertés, parce que la Loi sur les mesures d’urgence ne suspend pas l’application de la Charte.

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