Francis Scarpaleggia
Francis Scarpaleggia
Député de Lac-Saint-Louis
Discours : projet de loi 21 (armes à feu)
21 juin 2022

D’entrée de jeu, je tiens à dire que les propriétaires d’armes à feu que je connais — même si je suppose que, parmi toutes les personnes que je connais, je ne sais pas qui exactement possède des armes à feu — sont des citoyens irréprochables. Je pense à quelques personnes en particulier. Ces personnes sont des piliers de la collectivité et font régulièrement du bénévolat.

Il est très important de ne pas prêter des intentions à ceux qui possèdent légalement des armes à feu, car ils prennent leurs responsabilités très au sérieux. En fait, j’ai parlé récemment au téléphone avec un de mes concitoyens qui détient une arme à feu. De toute évidence, il n’est pas enchanté par tous les aspects de ce projet de loi, mais il accepte volontiers de se conformer à toutes les exigences découlant de la possession d’armes à feu, qui est une responsabilité que lui offre le gouvernement.

De plus, je tiens à dire que je comprends que la chasse a une valeur culturelle. En fait, il y a de nombreuses années, j’ai eu l’occasion de me rendre à Rouyn-Noranda dans le Nord du Québec pendant la saison de la chasse à l’orignal. J’ai pu constater de mes yeux à quel point cette pratique est profondément ancrée dans la communauté. La chasse à l’orignal rassemble la collectivité. Il y a un profond respect pour l’animal. Je me souviens d’avoir assisté à un concours d’appel d’orignal dans le sous-sol d’une église et l’assemblée prenait la chose très au sérieux.

Je peux aussi comprendre la valeur sentimentale, si l’on peut dire, que certaines personnes accordent aux armes à feu qui leur sont laissées en héritage. C’est la députée de Kildonan—St. Paul, si ma mémoire est bonne, qui a parlé d’une carabine ou d’un fusil de chasse qui se transmet de génération en génération dans sa famille. En un sens, cette arme à feu incarne les efforts déployés par sa famille depuis tout ce temps pour se faire une vie dans un milieu hostile au beau milieu du Manitoba.

Je comprends la valeur sentimentale que peuvent revêtir les armes reçues en héritage, mais je vois mal quelle peut être la valeur sentimentale d’une arme du samedi soir ou d’un AK‑47, par exemple. Les ancêtres de la députée de Kildonan—St. Paul se sont servis de la carabine en question pour survivre dans la nature — c’est en tout cas ce que je présume —, mais certaines armes à feu servent plutôt à perturber la vie de quartier de manière violente.

Ce projet de loi ne nie pas la valeur culturelle de la chasse. Il ne cherche pas non plus à persécuter les chasseurs de canards ou de cerfs, qui de toute façon ne se servent pas d’armes de poing pour abattre leurs proies. Il nous incite plutôt à agir avant qu’il soit trop tard. Ce que je veux dire, c’est que je serais fort étonné qu’un seul député souhaite que le Canada devienne comme les États‑Unis actuellement. Quel que soit notre parti, je crois que nous partageons tous cette opinion.

Aux États‑Unis, il y a plus d’armes à feu que d’habitants. Les gens ont l’habitude de porter une arme à feu; lorsqu’on prend l’autobus, on peut tenir pour acquis, du moins, il serait logique de tenir pour acquis qu’un des passagers porte un pistolet. Quand on accroche une personne par mégarde, on ne sait pas comment elle va réagir, si elle va s’offusquer. Cela pourrait entraîner des conséquences tragiques. Aux États‑Unis, il y a des tragédies impliquant des personnes armées presque chaque jour. Personne dans cette enceinte ne souhaite qu’on en arrive là; aucun député ne veut que cela se produise au Canada.

La violence liée aux armes à feu est un problème aux multiples facettes, et je pense qu’il est primordial de ne pas simplifier exagérément ce problème. Je comprends que, durant la période des questions, les questions peuvent être unidimensionnelles et que les problèmes sont présentés d’une façon simplifiée. Cela fait partie de la joute oratoire des débats. Cependant, quand vient le temps de concevoir des politiques, il ne faut pas simplifier exagérément les aspects à prendre en considération.

Des députés ont mentionné pendant leur discours que les crimes commis avec des armes à feu sont à la hausse depuis l’arrivée au pouvoir des libéraux. Le premier péché mortel de ceux qui simplifient à outrance est de confondre corrélation et causalité. Regardons les faits de plus près.

Depuis 2009, les infractions violentes commises à l’aide d’une arme à feu ont augmenté de 81 %. Si je ne me trompe pas, 2009, c’était avant 2015, donc avant l’élection du gouvernement libéral. La hausse du nombre de crimes commis avec des armes à feu n’a rien à voir avec le programme du gouvernement libéral. En fait, elle est probablement davantage attribuable aux coupes que l’ancien gouvernement Harper a faites dans le financement de l’Agence des services frontaliers du Canada.

Autre fait: les armes de poing sont les armes préférées des criminels. Nous savons que la GRC et les services frontaliers s’emploient avec ardeur à empêcher l’entrée d’armes à feu, surtout d’armes de poing, au Canada. Je crois d’ailleurs qu’ils ont intercepté, en 2021, presque deux fois plus d’armes à feu que l’année précédente. Les forces du gouvernement travaillent fort et ont un certain succès. L’idée que l’augmentation de la violence commise avec des armes est attribuable au gouvernement libéral est une simplification terriblement exagérée qu’on ne devrait pas tolérer.

J’ai aussi appris que plus de la moitié des armes utilisées pour commettre des crimes en 2020 au Canada provenaient du pays. Autrement dit, il s’agissait soit d’armes acquises légalement, soit d’armes volées ou achetées par l’entremise d’un prête-nom. C’est un grand nombre d’armes à feu qui sont en fait des armes légales. Le problème des armes illégales qui traversent la frontière est évidemment grave, mais le réservoir d’armes légales au pays l’est tout autant.

J’aimerais également souligner que les Canadiens ordinaires, nous tous, avons le droit de nous sentir en sécurité. Nous entendons l’opposition en parler constamment lorsqu’elle aborde les questions de criminalité. Elle parle toujours des victimes et du fait que la collectivité a le droit de se sentir en sécurité. C’est là l’objectif premier du projet de loi. Il s’agit du droit des Canadiens de se sentir en sécurité dans leur collectivité, et surtout, par exemple, les victimes de violence conjugale.

Je soutiens qu’il y a une contradiction dans le discours des conservateurs. Lorsqu’il s’agit de protéger les collectivités en imposant des peines minimales, les conservateurs sont tout à fait d’accord, mais lorsqu’il s’agit de les protéger en réduisant la violence commise à l’aide d’une arme à feu, ils disent soudainement qu’ils veulent bien sûr réduire la violence armée, mais que l’approche du gouvernement libéral n’est tout simplement pas pratique et n’a aucune chance de fonctionner. Autrement dit, l’argument comporte une grosse échappatoire.

C’est un problème complexe qu’on ne résoudra pas uniquement en gelant le réservoir d’armes de poing légales au Canada. Des fonds sont requis. Nous avons déjà investi 920 millions de dollars dans la lutte contre la violence liée aux armes à feu. Cela inclut 312 millions de dollars sur cinq ans pour accroître la capacité de renseignement et d’enquête à la frontière, ainsi que le versement de 250 millions de dollars aux municipalités et aux communautés autochtones afin qu’elles mettent en place des programmes de prévention de la violence liée aux gangs par l’entremise du Fonds pour des collectivités plus sûres. Quant à ma province, le Québec, le gouvernement lui a récemment versé 46 millions de dollars dans le cadre de l’initiative de lutte contre les armes à feu et les gangs.

Je pense que je vais m’arrêter là. J’ai hâte d’entendre d’autres discours sur le sujet.

 

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