Francis Scarpaleggia
Francis Scarpaleggia
Député de Lac-Saint-Louis
Discours : prix sur le carbone
07 février 2023

Les Canadiens souffrent. C’est évident. On le constate tous les jours aux nouvelles et on en parle à la Chambre. Bien que le marché de l’emploi soit fort, ce qui n’est pas négligeable, l’inflation est à son pire niveau en 40 ans. L’inflation a toujours existé. Chaque année, on constate de l’inflation. Même à 2 %, c’est de l’inflation, mais l’inflation actuelle est évidemment la pire que nous ayons connue en 40 ans. C’est un fait indiscutable. Nous connaissons aussi la première guerre en Europe depuis 78 ans, et le climat est plus instable que jamais.

Je vais commencer mon discours par une citation, si vous le permettez. Il s’agit de la citation d’un agriculteur canadien du nom de David Coburn, qui contribue à mettre du pain sur la table des familles de notre grand pays. Cette citation est tirée d’un article de la CBC datant de novembre, il y a tout juste quelques mois. M. Coburn a déclaré: « Cela va faire grimper l’inflation [...] Toute la nourriture doit être transportée par camion à un moment donné, alors cela ne va pas aider l’inflation. »

De quoi parlait M. Coburn? Il parlait du prix du diésel, le carburant qui fait rouler l’économie mondiale. Je cite encore l’article du site Web de la CBC:

Lorsque le prix de l’essence grimpe, les automobilistes vont peut-être grimacer ou encore, s’ils le peuvent, décider de ne pas prendre le volant. Or, les trains, les camions, les navires et les barges qui font tourner l’économie fonctionnent au diésel et ils n’ont pas cette possibilité.

L’article, qui date de novembre dernier, ajoute ce qui suit:

Au Canada, le prix moyen du diésel à la pompe a atteint 2,40 $ le litre à différents endroits pendant le mois, un niveau jusque-là inimaginable que bon nombre d’entreprises essaient tant bien que mal d’absorber.

Bien des raisons expliquent ce qui se passe, mais l’impact se résume à une réalité fondamentale: la situation fait grimper le prix de tout et aggrave l’inflation.

Qu’est-ce qui a fait grimper le prix du diésel? Comme nous le savons, les fermetures de raffineries pour des travaux d’entretien ont des répercussions sur l’offre et le prix du diésel dans un marché qui est fondé sur l’offre et la demande. Par exemple, la raffinerie Irving à Saint John a été fermée au cours de l’automne pour des travaux d’entretien, ce qui a retiré 300 000 barils par jour du marché. Les fermetures de ce genre sont fréquentes, mais, lorsqu’elles se produisent dans un marché très serré, elles entraînent d’énormes variations dans le prix du diésel et de l’essence parce que des barils qui auraient pu répondre à des besoins locaux ne sont tout simplement pas disponibles. Dans le cas qui s’est produit en novembre, au Nouveau‑Brunswick et, par conséquent, dans tout le Canada, des barils qui auraient pu répondre à des besoins locaux ont été détournés pour être envoyés de l’autre côté de l’océan.

Je reviens au même article, qui cite un homme du nom de Patrick De Haan, un analyste de Chicago qui tient le site Web GasBuddy.com. Il a dit ce qui suit:

L’Europe tente de délaisser les produits pétroliers russes comme le diésel. Par conséquent, une grande partie des produits qui auraient pu être importés sur la côte Nord‑Est ou la côte Est du Canada, ainsi que dans le Nord‑Est des États‑Unis, est envoyée là-bas.

Essentiellement, l’Europe se bâtissait des réserves en prévision de l’hiver, ce qui signifie que, lorsque la raffinerie Irving a suspendu sa production pour effectuer les travaux d’entretien, il n’y avait pratiquement plus de marge de manœuvre sur le marché, alors le prix a monté en flèche.

Un autre facteur a fait augmenter la demande en matière de pétrole et de gaz naturel: la reprise des activités du secteur du transport aérien. Toujours dans le même article de CBC, l’analyste Paul Pasco, du cabinet Kalibrate, dit: « [...] le fait que les activités de transport aérien reviennent tranquillement à leurs niveaux prépandémique n’aide pas non plus. » Il poursuit: « Le diésel, le kérosène et le carburéacteur font essentiellement partie de la même catégorie. Ils forment tous ce qu’on appelle les barils de distillat. » Ainsi, beaucoup de facteurs ont contribué ou contribuent toujours au prix très élevé du diésel.

L’opposition veut nous faire croire que toutes ces énormes forces qui influent sur le marché international ne sont pas vraiment la cause de la hausse des prix. Ils s’obstinent à dire que c’est la faute de la tarification du carbone. Or, tous les experts s’entendent pour dire que, et je cite un professeur d’économie de l’Université de Calgary: « [...] si les prix sont actuellement supérieurs à ce qu’ils étaient il y a quelques mois, c’est principalement en raison de facteurs autres que la tarification du carbone. »

Selon le professeur Trevor Tombe, la tarification du carbone par le gouvernement fédéral ajoute 11 ¢ le litre au prix de l’essence. Il ajoute qu’il est faux de croire que la taxe sur le carbone est la cause du prix élevé de l’essence. Il dit: « Bien que, comme vous le savez, 11 cents le litre ne soient pas négligeables, ce n’est pas ce qui est à l’origine des hausses que nous observons actuellement [...] Ces hausses sont en vérité attribuables au cours du pétrole à l’échelle mondiale, et celui-ci dépend de facteurs complètement indépendants de la volonté du gouvernement du Canada. »

Je ne sais pas de quoi parlent les députés d’en face. Je ne sais pas ce que leurs attachés de recherche leur disent ni pourquoi ils leur disent de telles choses, mais ils ne se fondent vraiment pas sur les bons facteurs pour expliquer ce qui se passe dans l’économie, ce qui est plutôt inquiétant de la part d’un parti qui prétend vouloir gouverner le pays. Comment les conservateurs pourraient-ils prendre de grandes décisions s’ils ne comprennent pas les notions économiques de base?

On sait que le chef de l’opposition porte un immense respect à Milton Friedman. On pourrait même dire qu’il lui voue un culte. On sait d’ailleurs qu’il garde, sous son bras, un exemplaire d’un livre de M. Friedman, A Monetary History of the United States — Une histoire monétaire des États‑Unis en version française. Voyons ce que Milton Friedman aurait à dire sur l’enjeu qui nous occupe.

L’école d’économie de l’Université de Chicago, dont Milton Friedman a été l’économiste en chef pendant longtemps, a organisé il y a quelques années un forum sous le thème « Que ferait Milton Friedman au sujet des changements climatiques? » L’ancien représentant américain Bob Inglis, un républicain de la Caroline du Sud, a ouvert le débat en diffusant un extrait vidéo datant de 1979, où on voyait Milton Friedman à l’émission The Phil Donahue Show. Dans cet extrait, Phil Donahue lui demande: « Y a-t-il lieu pour le gouvernement d’intervenir dans la lutte contre la pollution? », ce à quoi Friedman répond: « Oui, il y a lieu pour le gouvernement de faire quelque chose. Il y a toujours lieu pour le gouvernement de faire quelque chose à ce sujet. »

Il disait essentiellement que le marché s’était enrayé, qu’il ne fonctionnait pas efficacement, et qu’il fallait donc intervenir. Que voulait-il dire par là? Il a déclaré, en faisant référence au coût de la pollution:

[C]es coûts sont réels et ils ne se reflètent pas dans le coût de l’électricité ou du plein d’essence. Émettre du dioxyde de carbone dans l’atmosphère permet certes de produire de l’électricité à moindre coût, mais c’est au détriment de tout un groupe de gens, qui s’en trouvent pénalisés. C’est donc une mauvaise idée sur le plan économique.

J’ignore si le chef de l’opposition a lu la citation de M. Friedman. Ce dernier a ajouté:

Ce dont nous avons besoin, c’est d’un mécanisme de rajustement qui nous permettra de nous adapter à l’évolution de la situation. Tout le monde ici sait qu’il existe un tel mécanisme, à savoir le mécanisme de fixation des prix. À mon avis, si nous connaissons aujourd’hui un problème de pollution de l’air, c’est que nous n’avons pas laissé ce mécanisme fonctionner.

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