Francis Scarpaleggia
Francis Scarpaleggia
Député de Lac-Saint-Louis
Discours : Règlement sur les combustibles propres
01 juin 2023

Madame la Présidente, puisque nous parlons aujourd’hui de carburant, d’essence et de ce genre de choses, j’aimerais vous poser une question. C’est une question rhétorique, alors je ne m’attends pas à recevoir une réponse. Avez-vous une auto? Je suis sûr que oui. Je suis certain que vous roulez sur des autoroutes à deux ou trois voies. Si vous êtes comme moi, vous voyez, de temps à autre, un conducteur qui se déplace continuellement d’une voie à l’autre sans signaler son intention. C’est frustrant et dangereux. Je reviendrai à ce conducteur plus tard.

L’opposition officielle a le don de soutenir deux positions contradictoires en même temps. C’est un jeu d’équilibre astucieux et, d’une certaine façon, j’en suis impressionné. C’est troublant, mais c’est aussi astucieux. L’opposition officielle réussit à défendre deux positions opposées en même temps. On dirait qu’elle veut avoir le beurre et l’argent du beurre. Voici un exemple. Nous entendons dire tous les jours que l’inflation est causée par une trop grande quantité d’argent en circulation par rapport à l’offre de biens. Autrement dit, elle est causée par l’augmentation record de la masse monétaire qui a eu lieu pendant la pandémie. Le lendemain, les représentants de l’opposition officielle affirment que l’inflation est créée par les coûts, principalement par la tarification du carbone, et non par d’autres facteurs qui influent sur les coûts, comme les goulots d’étranglement de la chaîne d’approvisionnement. Voici un deuxième exemple. Les représentants de l’opposition officielle prennent la parole pour dire que l’horrible problème de drogue qui afflige le Canada est attribuable au faible prix des drogues vendues dans la rue, qui ont créé une forte demande. Pourtant, selon eux, le prix élevé de l’essence n’aurait pas pour conséquence de réduire la demande. Autrement dit, les toxicomanes seraient les seuls à être influencés par les prix. Les contradictions ne cessent de s’accumuler.

Voici un troisième exemple. L’opposition officielle était pour la tarification du carbone, avant de décider d’être contre. J’estime que chaque député conservateur des Communes se doit d’expliquer à ses électeurs pourquoi il a défendu la tarification du carbone pendant la campagne électorale et pourquoi il est revenu sur sa promesse après avoir été élu. Ils disent que la tarification du carbone est une taxe, mais ils vivent dans un autre monde. La tarification du carbone n’est qu’un transfert. Ils disent que la norme sur les carburants propres constitue une deuxième taxe, mais avec cette norme, le gouvernement n’impose aucune taxe supplémentaire. La norme sur les carburants propres n’est pas une taxe, c’est un règlement. Cela m’amène au quatrième exemple de contradiction chez les conservateurs. Pendant des années, ils se sont opposés à la tarification du carbone. Avant d’adopter leur plateforme en vue des élections de 2021, ils ont toujours privilégié les règlements, comme si les règlements n’étaient associés à aucun coût. C’est très simple. Par un simple coup de baguette magique réglementaire, on peut enrayer les changements climatiques car, pour eux, les règlements ne coûtent rien.

La norme sur les combustibles propres est un règlement. Le gouvernement ne reçoit pas d’argent. La norme entraînera le transfert de crédits entre les entreprises, mais uniquement si une entreprise n’atteint pas sa cible liée à l’intensité. On ne connaît même pas encore exactement combien de crédits une entreprise devra acheter, y compris en 2030, donc nous ne savons pas combien lui coûtera l’achat de ces crédits.

Les conservateurs devraient appuyer la norme sur les carburants propres, car c’est cela qui va encourager l’innovation. Or, c’est quelque chose qui leur plaît énormément, car chaque fois qu’il est question de lutter contre les changements climatiques, ils invoquent toujours la magie de la technologie, comme si elle ne coûtait rien. Le progrès et l’innovation technologiques sont souvent le résultat de réglementations gouvernementales, car il faut de l’argent pour financer la recherche fondamentale et appliquée qui permettra de développer de nouvelles technologies plus efficaces.

Ils vont maintenant nous dire, et c’est encore une autre contradiction dans leur discours, que les règlements sur le méthane que le gouvernement a mis en place et qui sont destinés à stopper les émissions fugitives volontaires ou involontaires constituent une taxe, ce qui n’est pas vrai. Nous sommes dans un conte de fées où les tours de passe-passe sont monnaie courante.

Ajoutons à cela les calculs fantaisistes des conservateurs. Ils sortent des chiffres d’on ne sait où en se gardant bien de donner des dates précises. Les députés se souviennent certainement de leur slogan « tripler, tripler, tripler », mais on dirait qu’ils le disent moins souvent depuis quelque temps. Avec ce slogan, ils laissaient entendre que les prix avaient explosé du jour au lendemain, alors que le prix du carbone n’augmente que de 15 $ la tonne par an, soit 30 % entre 2022 et 2023, mais certainement pas 300 %. Les conservateurs ont dû se tromper et mettre un zéro de trop. L’augmentation va dorénavant ralentir, puisqu’elle va être de 23 % entre 2023 et 2024, et de 19 % entre 2024 et 2025. La Fédération canadienne des contribuables, qui est loin d’être favorable au gouvernement libéral, estime que, après l’augmentation de 2023, la tarification du carbone représentera, en tout, un coût supplémentaire de 14 ¢ le litre, et non le triple.

L’opposition omet également de parler du remboursement, qui fait de la tarification du carbone un transfert. Milton Friedman, qui souscrivait à la tarification du carbone, n’incluait pas un remboursement dans sa formule. Nous savons que le chef de l’opposition officielle est un disciple de Milton Friedman. Je pense que Milton Friedman serait très contrarié, s’il était vivant aujourd’hui, de savoir que le chef de l’opposition officielle au Canada est contre l’utilisation d’un mécanisme de marché comme la tarification du carbone.

Selon les chiffres que le directeur parlementaire du budget a obtenus d’Environnement et Changement climatique Canada, le règlement sur la norme sur les combustibles propres entraînera une augmentation du prix de l’essence et du diésel de 17 ¢ le litre, mais pas avant que la norme ne soit pleinement en vigueur, c’est-à-dire en 2030. Les conservateurs ne mentionnent jamais la date lorsqu’ils disent « triple, triple, triple ». Ils oublient qu’il y a une date qui est loin dans le futur.

J’aimerais faire une autre observation au sujet de l’étude du directeur parlementaire du budget. C’est une évidence pour tous ceux qui ont étudié l’économie. Je ne sais pas combien de députés d’en face ont étudié l’économie, mais je suis certain que de nombreux autres députés s’y connaissent. L’analyse du directeur parlementaire du budget est fondée sur ce qu’on appelle l’économie « statique ». On fait les calculs en tenant pour acquis que tous les autres facteurs restent inchangés, de sorte que les innovations des entreprises qui leur permettront d’atteindre l’objectif d’intensité et leur éviteront d’avoir à acheter des crédits ne sont pas prises en compte. Ce genre de science économique n’est pas alimentée par les données réelles, qui évoluent, et je dirais que l’opposition officielle doit tenir compte de la réalité.

Je reviens à la grosse voiture bleue énergivore qui change constamment de voie sur l’autoroute. Les conservateurs sont favorables à la tarification du carbone, puis ils sont contre. Les conservateurs sont pour une réglementation qui stimule l’innovation, puis ils sont contre. La voiture bleue doit choisir une voie.

 

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