Francis Scarpaleggia
Francis Scarpaleggia
Député de Lac-Saint-Louis
Discours : seuils en matière d’immigration
31 octobre 2023

Je pense que les immigrants sont des poèmes au Québec. Je vais revenir là-dessus un peu plus tard. Le Québec est une société accueillante, beaucoup plus accueillante que ne le laissent parfois entendre certains propos ou gestes de son gouvernement.

Selon un sondage Léger de mai 2023, qui va dans le même sens que les chiffres que citait mon honorable collègue tantôt, à peu près 20 % des Québécois pensent qu’on devrait recevoir plus ou beaucoup plus d’immigrants, contrairement à 17 % ailleurs au Canada. Cela souligne un fait assez intéressant face à l’opinion publique québécoise. J’irais jusqu’à dire que le Québec pourrait donner des leçons à plusieurs pays aux prises avec des défis démographiques beaucoup moins importants, mais qui suscitent néanmoins de vives réactions à l’endroit des immigrants. On pense évidemment aux États-Unis ces dernières années.

Ce n’est pas d’hier qu’on affiche, au Québec, un esprit d’accueil généreux, et parfois très charitable, envers ceux venus d’ailleurs, très souvent dans un état désespéré. On pense notamment aux Irlandais arrivés à Montréal au XIXe siècle, atteints de maladies, plus particulièrement du typhus.

En passant, j’aimerais ici attirer l’attention sur mon ami Scott Phelan qui, de pair avec Fergus Keyes et bien d’autres, trop nombreux pour que je puisse tous les nommer, travaille d’arrache-pied à la Fondation du Parc du Monument irlandais de Montréal afin de réaménager la zone autour la fameuse Roche noire, qui repose sur un petit îlot au milieu des quatre voies de la rue Bridge à l’entrée du pont Victoria. Ce rocher marque l’endroit où sont enterrés 6 000 Irlandais ayant fui la Grande Famine en 1847, atteints du typhus comme mentionné, et dont les sépultures ont été découvertes en 1859 par les ouvriers, eux aussi irlandais, qui construisaient le pont Victoria.

 Voici un fait intéressant: ce sont environ 70 000 immigrants irlandais qui sont arrivés sur les rives du Saint-Laurent à Montréal à l’époque où la population de l’île entière n’était que de 50 000 personnes.

Je me permets maintenant de parler de ma propre circonscription, située sur l’île de Montréal, la circonscription de Lac‑Saint‑Louis, dans la région dont on se moque parfois ici, par exemple lors des débats sur le projet de loi C‑13, en l’appelant la région du West Island. Cibler de cette façon n’importe quelle région du Québec n’est pas digne des Québécois et des valeurs québécoises.

 J’aimerais prendre un petit instant pour décrire ma circonscription de Lac‑Saint‑Louis. Sur le plan de la démographie, 71 % de la population est bilingue, environ 42 % des gens ont l’anglais comme langue maternelle, alors que le français est la langue maternelle d’environ 22 %. Soit dit en passant, c’est la circonscription natale du premier ministre Legault.

La circonscription abrite deux cégeps, dont le Cégep Gérald-Godin, qui est un important pôle de la culture québécoise francophone. À la Salle Pauline-Julien du cégep, on peut assister régulièrement à des prestations de musique, de théâtre et de cinéma francophone de la plus grande variété et de la plus haute qualité. Comme le savent la plupart des gens du Québec, Gérald Godin et Pauline Julien, c’était une grande histoire d’amour superposée sur une période fébrile de l’histoire du Québec et du Canada.

Je tiens à mentionner la directrice de la salle Pauline-Julien, Annie Dorion, pour son leadership exceptionnel. Elle fait de cette salle un véritable joyau culturel dans l’ouest de l’île. J’inviterais tous les députés à consulter sa programmation et à venir y faire un tour.

Dans Lac-Saint-Louis se trouve aussi un cégep anglophone, le Cégep John Abbott, où ont étudié plusieurs des pages de la Chambre. Ce cégep est situé au cœur du campus Macdonald de l’Université McGill, institution académique de grande renommée internationale. Cette dernière est malheureusement visée par la récente annonce de la hausse des frais de scolarité pour les étudiants venus de l’extérieur de la province.

Cette annonce, sans justification, ressort d’une politique improvisée et populiste. Pourquoi avoir peur d’environ 35 000 étudiants venus d’en dehors du Québec pour fréquenter le postsecondaire, dont certains choisiront d’y demeurer à long terme par amour de la langue française et de la culture québécoise et pour contribuer, avec leur matière grise, à faire avancer la nation québécoise? Par la suite, penserons-nous à mettre un frein au tourisme?

La motion du Bloc québécois parle de la capacité des provinces à recevoir des immigrants, un souci quand même très valable. La motion laisse cependant entendre que cette capacité demeure statique, alors qu’il faut voir les choses en temps réel. Il faut appeler les provinces à travailler activement, main dans la main, notamment avec les corps professionnels, afin d’assurer une plus grande capacité d’intégration des nouveaux arrivants dans les secteurs des services sociaux, de la santé, de l’éducation et des métiers de la construction, par exemple. Il faut le faire afin d’assurer la main-d’œuvre dont le Québec a besoin pour s’attaquer à la crise du logement, afin de nous assurer que, lorsque nous devons malheureusement entrer à l’hôpital, des soins de santé de qualité peuvent nous être prodigués, ou que, lorsqu’on doit envoyer son enfant à l’école, il y a un enseignant ou une enseignante à l’avant de la salle de cours.

Je me permets enfin de revenir sur la toute première phrase de ce discours: « [...] les immigrants sont des poèmes au Québec ». Qui a dit cela? C’est Gérald Godin. Selon un article paru dans Le Devoir du 21 octobre dernier et signé par Jonathan Livernois, professeur à l’Université Laval, Gérald Godin avait « un intérêt particulièrement marqué pour les immigrants économiques  ». Je cite encore le professeur Livernois, en référence à une entrevue avec le ministre Gérald Godin à l’émission Impacts, en janvier 1984, une émission dont certains se souviendront:

Robert Guy Scully s’entretient alors avec son interlocuteur à propos des immigrants sans papiers, qui sont à cette époque entre 50 000 et 200 000 au Canada. Question de l’animateur: « Pensez-vous que les pays riches, comme le Canada, vont devoir, peut-être brutalement, resserrer leurs frontières face aux pays pauvres? » Godin refuse l’idée, croit au contraire qu’on ne doit pas freiner la mobilité et qu’il faut profiter de l’extraordinaire vitalité de tous ceux qui se déplacent dans le monde, avec ou sans papiers.

Livernois, dans son article, poursuit en disant ceci:

De nos jours, il n’est pas rare d’entendre un premier ministre en campagne électorale, questionné sur l’intégration des immigrants, sortir, de but en blanc, que les Québécois n’aiment pas la violence et qu’« il faut s’assurer qu’on garde ça comme c’est là actuellement ». Un ministre de l’Immigration peut dire, pendant cette même campagne électorale, que « 80 % des immigrants s’en vont à Montréal, ne travaillent pas, ne parlent pas français ou n’adhèrent pas aux valeurs de la société québécoise ».

C’est tout un contraste.

 

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