Francis Scarpaleggia
Francis Scarpaleggia
Député de Lac-Saint-Louis
Discours : motion de journée d’opposition
26 septembre 2024

Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole au sujet de cette motion. Ce que je vois dans cette motion, c’est le genre d’hyperbole qui vise à attirer l’attention et qui est en train de devenir la marque de commerce de la politique au sud de la frontière et la marque de commerce d’un certain candidat présidentiel au sud de la frontière. C’est le genre de discours qui inclut des expressions comme « le meilleur », « pire économie de tous les temps », « meilleur rendement du marché », « hiver nucléaire », « famine massive », « les gens ne pourront jamais sortir de chez eux et devront réduire le chauffage à 13 degrés Celsius » et ce genre d’hyperboles.

Je pourrais dire que, dans la phrase « le gouvernement le plus centralisateur de l’histoire du Canada », tirée de la motion, on a oublié d’ajouter les superlatifs « jamais vu » et « toute », ce qui donnerait, par exemple, « le gouvernement le plus centralisateur jamais vu de toute l’histoire du Canada », ou peut-être même « de toute l’histoire de l’humanité ». Pourquoi pas? C’est la langue des générateurs de slogans.

Sur quels critères se fonde-t-on pour faire de telles déclarations à l’emporte-pièce? Jetons un coup d’œil à l’histoire du Canada. Examinons les mesures, les politiques et les gouvernements conservateurs qui pourraient être considérés comme centralisateurs, même si nous considérons ces initiatives passées comme de bonnes initiatives d’édification de la nation découlant d’une forme plus constructive de conservatisme canadien.

Revenons un peu dans le temps. Le CN a fait les manchettes récemment. Qui a créé le CN, une société de la Couronne responsable des chemins de fer reliant le Canada d’un océan à l’autre, que certains pourraient trouver trop centralisatrice de nos jours? C’est le premier ministre Robert Borden.

Parlons de CBC/Radio‑Canada, la bête noire des conservateurs. Comment CBC/Radio‑Canada a-t-elle été créée? C’est en quelque sorte grâce au CN, car à ses débuts, le CN cherchait un moyen de divertir ses passagers. Il a donc créé, pour ses trains, une sorte de réseau radiophonique, un système de divertissement au goût du jour. Par la suite, cela s’est transformé en une organisation appelée CNR Radio. En 1932, R. B. Bennett a créé la Commission canadienne de la radiodiffusion, prédécesseure de CBC/Radio-Canada.

En ce qui concerne l’environnement, un point faible de l’opposition conservatrice, ce sont les conservateurs, sous la gouverne de Brian Mulroney, qui ont créé une loi environnementale pour l’ensemble du pays, qu’on pourrait donc qualifier de « centralisatrice ». C’était la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, promulguée en 1988 par M. Mulroney. Elle a été créée afin de fournir une approche systématique nationale pour évaluer et gérer les substances chimiques dans l’environnement, ainsi que pour créer des infractions criminelles visant les pollueurs.

À l’époque, le Québec voyait sans doute cette centralisation comme une intrusion indésirable dans un champ de compétence provinciale. Je pense bien que c’est le cas, car Hydro‑Québec, une société d’État provinciale, a contesté le gouvernement fédéral devant les tribunaux pour faire valoir que le gouvernement fédéral n’avait aucune compétence et qu’il empiétait essentiellement sur la compétence provinciale, mais la Cour suprême du Canada a jugé que le gouvernement fédéral avait bel et bien compétence, que c’était une question d’intérêt national et que, par conséquent, la compétence découlant du droit pénal était justifiée.

Jetons un coup d’œil aux parcs nationaux. Le réseau des parcs nationaux du Canada a vu le jour en novembre 1885, quand le gouvernement fédéral de sir John A. Macdonald a réservé une zone d’environ 26 kilomètres carrés sur le versant nord du mont Sulphur, en Alberta, à des fins d’utilisation publique. Je suppose que, dans le contexte actuel, cela serait perçu comme une intrusion du gouvernement fédéral dans un domaine de compétence provinciale.

Auparavant, les conservateurs disaient qu’ils aimaient défendre la conservation de notre patrimoine, qu’il soit naturel ou autre. Toutefois, les conservateurs d’aujourd’hui, du moins de mon point de vue, depuis ce côté-ci de la Chambre, semblent plutôt s’efforcer de bouleverser le système en misant sur le populisme et en attisant la colère.

Examinons un cas plus récent, la loi sur le manque d’intégrité des élections, qui est un exemple parfait d’approche musclée de la part d’un gouvernement fédéral majoritaire. À vrai dire, le parrain du projet de loi, c’était l’actuel chef de l’opposition. Le gouvernement s’était évidemment servi de sa majorité pour essayer d’empêcher les gens de voter en misant sur une approche pour ainsi dire musclée et autoritaire.

Il y a aussi eu une certaine centralisation sous les libéraux, par exemple avec le régime national d’assurance-maladie et le Régime de pensions du Canada. Si je puis me permettre, un peu à la blague, puisqu’il s’agit d’un débat bon enfant, je pense que les conservateurs sont envieux parce que ces idées n’étaient pas les leurs, à un point tel qu’ils essaient de les détruire.

De tous les modes d’organisation humaine connus, lequel est le plus décentralisateur, un mécanisme éminemment décentralisé et éminemment hors de la portée des instances gouvernementales, un véhicule de l’autonomie citoyenne qui est synonyme des mots « liberté » et « démocratie », l’antidote même à la centralisation? La réponse est simple: c’est le marché et son effet sur les prix. C’est ce que l’on appelle la main invisible qui permet à la société de croître et de prospérer de façon anonyme grâce à des billions de relations individuelles qui sont hors de la compétence et du contrôle de l’État.

Puisque la motion mentionne la tarification du carbone, je tiens à le dire clairement: il n’y a pas de taxe sur le carbone. C’est la Cour suprême qui l’a dit. Nous savons que les conservateurs n’ont pas beaucoup de respect pour la Cour suprême, mais elle a déclaré que la tarification du carbone n’est pas une taxe sur le carbone, puisque l’argent est remboursé. Ce n’est pas une taxe. Cette opinion ne vient pas de moi, mais bien des juges de la Cour suprême.

Je me permets de citer une analyse récente d’Andrew Coyne, publiée dans le Globe and Mail, au sujet de l’approche des conservateurs en matière de politique environnementale. Nous savons tous qu’Andrew Coyne est un journaliste lucide et incisif qui n’est décidément pas un grand partisan du Parti libéral. Je pense qu’Andrew Coyne est extrêmement objectif. Voici ce qu’il dit de la politique environnementale des conservateurs:

La position des conservateurs [semble être] d’après ce qu’on peut y comprendre [...] que la lutte contre les changements climatiques devrait se faire, le cas échéant, non pas en tirant parti du pouvoir du libre marché, mais au moyen d’une planification centrale, d’un mélange de règlements autoritaires et de subventions gouvernementales [...]

Dans quelle mesure la tarification du carbone est-elle plus efficace que les autres solutions? Il y a quelques années, la Commission de l’écofiscalité, un groupe d’économistes en environnement, a estimé qu’une taxe sur le carbone suffisante pour que le Canada atteigne ses objectifs de réduction des émissions, convenus à l’échelle internationale, aurait un coût économique annuel correspondant à 0,05 % du PIB.

En revanche, le coût de l’approche axée surtout sur la réglementation représente 0,8 % du PIB, soit 16 fois plus. À un moment où la croissance ne devrait atteindre que de 1,6 % en moyenne, c’est une différence énorme.

Ce que nous observons dans le rejet de la tarification du carbone, un mécanisme reconnu par Milton Friedman — l’économiste préféré du chef de l’opposition et même son héros en matière d’économie — comme la meilleure façon de lutter contre la pollution, c’est un rejet de l’approche du libre marché. C’est un gouvernement qui privilégierait plutôt, comme l’a dit Andrew Coyne, un système « autoritaire ». On peut difficilement avoir une approche plus centralisatrice que celle-là. Je pense que le parti d’en face devrait faire son propre examen de conscience à cet égard.

Le Parti conservateur prétend croire à l’autonomie des provinces et au respect des compétences provinciales. Pourtant, le chef de l’opposition prévient les administrations municipales que si elles ne font pas ce qu’il dit pour résoudre la crise du logement, il les punira. Je pense que les politiques et les gestes des conservateurs ne cadrent pas avec la logique rhétorique de la motion.

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